Pressentiment sur une fin : Sur Venise dans Corinne (article japonais), “Literature and Gender, Women’s Studies Center, Osaka Prefecture University, pp.15-29, 2015
Nous étudierons d’abord les sujets de Corinne ou l’Italiepublié par Mme de Staël en 1807. Puis nous nous pencherons sur l’épisode de Venise, point culminant de la seconde moitié du roman, et dernière épisode de l’idylle italienne.
C’est en 1805 que Mme de Staël visita Venise, qui était déjà sous occupation autrichienne. La même année, Napoléon fut couronné roi de Rome, et l’on vit son pouvoir s’étendre sur toute l’Italie. La Mme de Staël de 1805 s’était renseignée auprès d’allemands qui connaissaient bien l’Italie, afin de compléter ses propres connaissances sur ce pays. Elle était donc dans une situation où elle pouvait juger de manière suffisamment lucide le passé récent de l’Italie. L’année 1795 est celle où bien des Italiens commencèrent à entendre prononcer le nom du Général Bonaparte et, pour la République de Venise, c’était une année où l’on menait encore une vie tranquille, alors que les présages d’un effondrement dans les deux ans apparaissaient. Non seulement point de rencontre entre nord et sud, la Venise de 1795 était le lieu où se rencontraient l’est et l’ouest, se situant littéralement sur la frontière entre terre et mer. Dans Corinne, cette ville correspondait donc mieux que Rome, Naples, ou Florence, comme lieu de séparation pour les amants ainsi que comme lieu de pressentiment d’une fin proche. Enfin, Venise était aussi la ville qui convenait le mieux à Mme de Staël pour faire part de ses considérations sur la république, et développer ses idées sur la situation du peuple et des femmes.